Interview de Christian GANA sur le cerveau du ventre

par Solène Delarue - 04 août 2015
paru dans le magazine Santé science et conscience numéro 3 - sept 2015
Introduction
[Solène DELARUE] Hors pathologies avérées on parle généralement du ventre comme d'une question de tuyauterie, au ralenti ou en excès. A l'heure actuelle il y a un foisonnement de nouvelles infos, on parle du cerveau du ventre un peu partout, la présence de neurones dans l'intestin, le documentaire d'Arte en février 2014, des travaux passionnants en Allemagne, d'autres en France sur le microbiote intestinal, et puis tout récemment le livre de Giulia Enders "Le charme discret de l'intestin : tout sur un organe mal aimé" aux Editions Actes Sud. Dans ce foisonnement là, qu'est ce qui vous semble le plus important à mettre en avant ?
[Christian GANA] Ce qui me semble particulièrement important est de ne pas séparer les visions des deux cerveaux - système nerveux cérébral et système nerveux entérique ou le cerveau de tête et le cerveau du ventre. A mon sens, ils forment une unité qu'on ne perçoit plus. On les perçoit souvent si ce n’est toujours comme deux entités différentes et séparées. De mon point de vue elles doivent réapprendre à se connaître, à vivre ensemble et puis à œuvrer ensemble pour une réalité existentielle qui nous dépasse.
Dans les discussions que j'ai avec des jeunes c'est bien cela qui les intéresse, plus que les dénominations cerveau du ventre / cerveau de tête, qui viennent compartimenter la compréhension, alors qu'ils sentent bien qu'il y a quelque chose qui transcende notre réalité quotidienne, qui essaye d'exprimer quelque chose au travers de ces deux réalités qui apparaissent souvent antagonistes…les deux systèmes nerveux.
L'important maintenant est de comprendre comment ces deux organes du corps humain communiquent, quels peuvent être les défauts de communication, et, puisque le cerveau a pour tâche d'amener une certaine compréhension des choses du monde dans lequel nous vivons, d’y découvrir un sens des relations, où se situe la compréhension. Est-ce que c'est dans le cerveau qu'il soit entérique ou cérébral, ou est-ce autre part ?
Je pense particulièrement à ce que disait Henri Laborit, qui expliquait que "tant que l’on n'aura pas diffusé très largement aux hommes la façon dont fonctionnent leur cerveau et la manière dont ils l'utilisent, il y a peu de chance qu'il y ait quoi que ce soit qui change sur cette planète." Hors de mon point de vue, la synthèse de ces deux types de connaissance sur le cerveau, que j'appelle moi global, permettra aux hommes de mieux comprendre de quelle manière, d'une certaine façon, ils manquent d’autonomie vis-à-vis de leur environnement et comment ils le manipulent eux-mêmes de par leur comportement dans leur vie de tous les jours. Hormis le fait qu'il y a aujourd'hui suffisamment de données pour expliquer ce qu'est le cerveau du ventre, on sait que tous les neurones qui tapissent l’ensemble du système digestif sont de même structure et de même nature que le cerveau de tête, et traitent l'information quasiment de la même manière au travers des mêmes neurotransmetteurs. Il y a maintenant suffisamment de données extérieures issues des différents laboratoires de recherche dans le monde entier qui permettent de réunir de la documentation et d'étudier cela comme on étudie le cerveau. De ce point de vue, c'est pour moi quelque chose d'acquis.
[S] Pouvez-vous situer ce « lieu » de communication entre les deux systèmes nerveux ?
A mon sens et d’après mon expérience, cela se situe au niveau du cœur. C'est là où le nerf vague, qui passe par le cœur, joue un rôle fondamental. Cet « espace du cœur » est plus connu sur le plan des démarches intérieures ou spirituelles, aussi bien dans le Yoga que dans les exercices évolués de Chi Kong, ou encore au niveau de certains exercices de méditation au niveau du Christianisme ésotérique. Il apparaît que le cœur ne peut véritablement fonctionner au niveau de ce qu'il a de plus qualitatif - c'est à dire dans la compréhension de l'environnement, dans la compréhension de l'autre, et dans le don de soi à l'autre - que lorsque les deux cerveaux, entérique et cérébral, peuvent communiquer, se connaitre, s'apprécier et se respecter chacun leur champ d'activité. A ce moment là, au lieu d'être antagonistes, ils deviennent complémentaires au service d’une réalité qui les dépasse.
[S] Comment favoriser cette bonne relation ?
D'après mon expérience, plus que de la connaissance, il y a certains conseils, donnés par les gastroentérologues et les naturopathes, qui peuvent aider à concilier une relation harmonieuse entre les deux cerveaux. Je pense par exemple à une qualité de nourriture issue de l’agriculture biologique, et à l’importance des aliments entiers, ou «totum», alors que dans l’industrie alimentaire on extrait les principes actifs, de fruits, de plantes, incomplets en soi, qui ne permettent pas une bonne assimilation Or le corps sait reconnaître les totums, il sait les gérer.
On sait aujourd'hui, par les études sur le microbiote, que nous sommes habités par des milliards de bactéries, certaines dites positives ou amies et d'autres négatives qui ne sont pas favorables à la vie. On sait aujourd'hui définir, rechercher, déceler le manque de certaines de ces bactéries probiotiques et on est capable de les conseiller pour soulager un métabolisme fatigué. Et le métabolisme n'est pas que dans l'intestin, c'est de la bouche à l'anus. On sait que les probiotiques ont besoin d'enzymes, de prébiotiques, que les enzymes eux-mêmes ont besoin de minéraux et je pense notamment au zinc qui est incontournable puisque sans zinc nombre d'enzymes ne peuvent pas travailler. Donc c'est tout un petit peuple qui est nécessaire pour veiller à ce qu'il y ait un bon métabolisme, tout au moins une bonne digestion des nutriments qui sont ingérés. Comme je dis souvent quand on est bien dans son ventre, on est bien dans son corps et dans sa tête. Quand on n’est pas bien dans son ventre, on n'est pas bien.
Tout organisme vivant est ouvert sur son environnement, ça c'est l'apport des sciences de l'auto-organisation depuis les années 70-80. Il nous faut maintenant intégrer cette vision de relation du vivant dans le monde vivant pour comprendre véritablement quel est le rôle du cerveau entérique. Parce qu'en fait le cerveau entérique est le point d'ouverture de notre métabolisme vis à vis du monde vivant environnant, que ce soit le monde vivant de la planète, du système solaire ou de la galaxie. Le deuxième point d'ouverture vis à vis du monde dit vivant, c'est le monde sensoriel. Or on pourrait dire que la guerre qui est instituée entre le cerveau cérébral et le cerveau du ventre provient souvent de la guerre qui a lieu dans le monde des sens.
On sait que dans la tête se logent cinq sens avec un sens coordonnateur, qu'on appelle dans le Yoga le mental. Et puis dans le ventre, d'après certaines études ésotériques très poussées ou en médecine anthroposophique, on dit qu'il y a sept sens internes. Or ces sept sens internes sont très particuliers et l’on ne nous apprend pas à les développer. Ils ne se développent pas de manière naturelle comme nos sens externes (l'ouïe, l'odorat, le goût, le toucher, la vue). Ils se développent en apprenant à vivre, en apprenant à être, et particulièrement dans la relation que nous tissons avec le monde environnant. Donc c'est avant tout un développement intérieur. C'est en ce sens où, de mon point de vue, l'apprentissage de la coordination des deux cerveaux est indispensable pour grandir en humanité. Ceci passe obligatoirement par une autre conception de la nourriture, de ce qui nous nourrit.
[S] Dans de précédents articles, vous parlez des nourritures émotionnelles que le ventre doit aussi « digérer ». Pouvez-vous développer cet aspect essentiel ?
Généralement lorsque l'on parle du métabolisme on parle d’ingestion de nourriture solide, liquide, on ne parle pas de ce qui nous nourrit sur le plan relationnel ou sensoriel. On sait aujourd'hui que nos perceptions influent sur nos capacités à digérer, sur notre métabolisme. Si pendant que l'on mange, on laisse un enfant regarder un film d'horreur, il ne sera pas bien dans son ventre dans les heures qui vont suivre. Si on nourrit notre personne humaine par le fait d’être entouré de belles choses, c'est bien différent que de se nourrir avec des choses laides, affreuses, qui ne sont pas adaptées à notre réalité humaine. C'est un autre type de nutrition qui impacte notre cerveau entérique en créant, de mon point de vue, une certaine forme de perméabilité intestinale. L'intestin n'ayant pas obligatoirement les clés pour trier parmi les nutriments qui sont ingérés psychiquement, c'est à dire émotionnellement et mentalement, trier ce qui est nécessaire à la survie et ce qui ne l'est pas, il laisse passer, au travers des villosités intestinales, un certain nombre de poisons qui passent dans la lymphe et dans le sang, et qui créent une perméabilité au niveau du cerveau. Cela génère toutes sortes de problèmes, par exemple l'électro-sensibilité.
Si le corps est nourri avec des aliments entiers, comme énoncé plus haut, alors il peut enseigner le mental à rechercher dans le monde social des choses qui sont entières et non pas se contenter de petits fragments d’informations. C'est envisager la nécessité de se retrouver entier, sur un plan physique, émotionnel (relationnel) et mental. La question est : que fait-on de tout ce qu'on ingurgite qui nous vient de la société au travers des médias ? Sommes-nous capables de développer un discernement qui nous permettrait de rejeter ce qui n'est pas vrai, ce qui n'est pas juste, ce qui nous pollue et finit par nous détruire intérieurement ?
[S] Pourrriez-vous revenir sur l'électro-sensibilité, puisque vous avez parlé de pollutions électromagnétiques dans un de vos précédents articles ?
Nous sommes en relation avec le monde extérieur par le monde des sens. Mais il y a des tas de choses qui sont d'ordre vibratoire, ondulatoire. Ce que l'on perçoit par nos yeux par exemple est vibratoire, une couleur, la lumière, etc. Des tas de choses existent dans la nature qu'on ne perçoit pas, telle que la radioactivité, certaines ondes électromagnétiques nocives. Or, qu'on le perçoive avec nos sens externes ou pas, notre corps en subit les conséquences. Il y a bien une perception intérieure d'une réalité qui n'est pas perceptive par les sens externes et notre cerveau. Il y a une perception extérieure, et une perception intérieure, et notre cerveau entérique n'a pas toujours les moyens de traiter l’information ainsi perçue afin de s’en défendre.
[S] Comment avez-vous été sensibilisé à ces questions ?
C’est par mon expérience que je suis arrivé à la connaissance du cerveau entérique. Je suis électro-sensible depuis l'âge de trente ans, cela fait donc plus de trente ans que je traine cela, mais déjà à l'âge de 27-28 ans des naturopathes m'avaient quasiment condamné et me disaient que je ne dépasserais pas les 35 ans ! Or, au travers de ma propre démarche, je me suis rendu compte que j'avais un organe de perception qui était mon ventre. Aujourd'hui on commence à le mettre en évidence. Il y a notamment eu l'année dernière aux Etats-Unis un congrès de fasciathérapeutes où les débats montrent que le tissu conjonctif est un organe de perception. Ce tissu conjonctif est totalement en phase avec le cerveau entérique. Et non seulement on nous dit que ce tissu conjonctif est un organe de perception mais on nous dit qu'il perçoit les choses avant nos organes de perception référencés. Il est connu par de nombreux paysans que si les oignons, par exemple ont ont huit couches, l'hiver va être rigoureux. La nature est capable de prévoir, d'appréhender le futur et de s'en prémunir.
Il serait aberrant de croire que l'homme naturel serait dépourvu de cet organe. Et cet organe, pour moi, c'est le cerveau entérique, capable d'appréhender le futur, d'appréhender un environnement dans sa globalité. Certaines personnes qui sentent qu'il s'est passé dans un endroit des choses difficiles, douloureuses ou à l'inverse, qui perçoivent des endroits porteurs d'une énergie qualitative et accueillante, le font avec ce tissu conjonctif. C’est notamment au travers de tous les liquides corporels qu'ils perçoivent cette réalité là. Du fait que dans notre société on ne nous apprend pas à reconnaitre cette réalité et à en prendre soin, comme on apprend à développer le monde de nos sens et notre mental, le cerveau du ventre n'est plus nourri de manière adéquate et n'a plus les moyens de se défendre contre certaines énergies ou ondes prédatrices qui viennent de notre univers extérieur, et notamment de notre univers social et technologique. Donc automatiquement, il se déprécie dans sa capacité d'appréhender le monde, de le digérer et surtout de le comprendre, de lui donner du sens.
Le sens, il va le faire passer au cerveau de tête par l'intermédiaire du plexus solaire, sous forme de rêves, "d'insights" comme on dit maintenant. Par exemple pour les personnes qui pratiquent la méditation c'est d'abord perçu par le ventre et après ça monte dans le cerveau cérébral. Le cerveau réfléchit les pensées qui sont issues du ventre, d'où ce que l'on appelle "réflexion".
De mon point de vue il n'y a pas de réflexion qui donne du sens à notre vécu, à notre environnement, à notre mouvement vers notre futur, si ce n'est pas perçu et compris par le ventre. Du fait que le ventre a la capacité d'appréhender le futur sans projection, par compréhension, il prépare le mental, notre comportement et l'organe de coordination qu'est le cerveau pour se diriger vers le futur. Alors qu'aujourd'hui la seule chose qu'on nous apprend, c'est comment contrôler le ventre, qui « sait où l’on va » alors que le cerveau de tête, lui, ne le sait pas. Il ne peut que projeter ses expériences passées vers le futur pour essayer de le caractériser, de le formater, de le contrôler et c'est ce que l'on voit aujourd'hui aussi bien dans la politique que dans la recherche scientifique.
[S] C'est une vision passionnante, extrêmement vaste et synthétique. Mais j'aimerais que vous reveniez Christian sur le nerf vague que nous avons juste nommé jusqu'à maintenant, sur sa nature et sa fonction. Pourriez-vous développer cet aspect ?
Le nerf-vague est le nerf qui permet la communication dans les deux sens, aussi bien du ventre vers la tête que de la tête vers le ventre, même si d'après les dernières recherches que j'ai lues, il y a beaucoup plus d'informations qui viennent du ventre vers la tête que de la tête vers le ventre. Ce qui ne veut pas dire qu'il y a une écoute suffisante de la tête par rapport au ventre. Et c'est là que se situe le problème : qu'est ce qui va nous permettre de cultiver, de développer cette qualité d'écoute ?
On sait aujourd'hui que dans toute approche alternative ou énergétique de la santé, on essaye de responsabiliser le patient et on lui demande d'être à l'écoute de ce qui se passe en lui et particulièrement dans son corps où se trouve ce que l'on appelle le "médecin intérieur". Mais qu'est ce qui va permettre de faciliter cette écoute ? C'est le centre du nerf vague situé au niveau du sternum. Ce point du nerf vague est considéré comme un chakra mineur dans certaines écoles, majeur dans d'autres. Il va permettre de mettre en rapport la qualité du chakra du cœur avec les liquides et notamment la lymphe et ses vaisseaux chylifères, au travers de l’activité du centre du nerf vague qui se trouve au niveau des ganglions lymphatiques derrière le sternum. A noter que le chakra du coeur s'occupe de la zone de la poitrine et nous connecte à l'aspect transcendant de notre personne tandis que le plexus solaire s'occupe de la zone du ventre.
Cette relation entre le chakra du cœur et les liquides lymphatiques va permettre au travers d'une activité méditative, de soins énergétiques de type plus ésotérique que simplement énergétique, de pouvoir faire pénétrer dans la lymphe et dans le sang un certain nombre d'hormones par le réveil du thymus qui est la glande associée au chakra du cœur.
On sait très bien que le thymus est l'une des glandes très importante au niveau du système immunitaire si ce n'est la glande la plus importante, avec les intestins. Chez un enfant le thymus est très développé et petit à petit en grandissant il se rétracte. En effet, dans notre culture occidentale qui n'est pas une culture axée sur le cœur, on ne stimule pas des sentiments qui seraient susceptibles de maintenir le thymus à sa taille idéale et à la fonctionnalité qu'il a quand on est enfant.
Un chercheur italien Roberto Zamperini, avec qui j'ai beaucoup discuté de ce sujet, s'est rendu compte que la glande du thymus et le sternum engramment tout ce qui est résidus de liens qui, basés sur nos croyances, nous empêchent d'aller de l'avant. De liens qui nous freinent. D'où les conseils que l'on donne pour ceux qui sont soumis à des projets contraignants ou à des relations sociales éprouvantes de nettoyer quotidiennement le thymus en utilisant le Cleanergy (technologie inventée par Roberto Zamperini) dès lors que le niveau de stress devient prégnant. Sinon, on commence à ruminer et cette rumination fragilise notre cerveau entérique car il n'a pas les moyens de lutter contre ça. Ca c'est l'aspect émotionnel du nerf vague.
A ce niveau là il existe des outils tels que les élixirs floraux de Bach, les élixirs animaux Phi d'Andreas Korté et d'autres, qui permettent de réguler tous les processus de rumination où la pensée tourne en rond. Il existe également des tas de procédés méditatifs mais qui nécessitent de rentrer dans un cheminement beaucoup plus sérieux de développement personnel puis de développement spirituel. Mais déjà au niveau des outils qui permettent d'essayer de se maintenir la tête hors de l'eau, se servir des remèdes Bach et autres est d'une aide précieuse. Et à partir de là, si on désire poursuivre ce mouvement vers l’intérieur alors, on peut trouver sur internet un certain nombre de méditations qui permettent l'ouverture du cœur et automatiquement l'activation de ce chakra mineur du nerf vague qui se trouve derrière le sternum.
Il faut aussi savoir que le sternum en tant qu’organe osseux, de manière symbolique, est une épée et un bouclier. La culture est faite de transmissions de valeurs et de symboles dont notre culture occidentale n’est pas exempte. Ainsi, de ce point de vue, le développement du centre du nerf vague, qui permet cette communication entre les deux cerveaux, permet à Saint-Michel de se servir de son bouclier et de son épée vis à vis des énergies prédatrices qui proviennent de l'extérieur.
[S] Voilà une perspective à plusieurs octaves ! Le rôle du nerf-vague est évoqué rapidement dans le livre de Giulia Enders, mais dans le travail de Navoti, cela correspond-il au Point d'Assemblage auquel vous faites souvent référence ?
Le Point d'Assemblage vient dans le troisième aspect du nerf-vague. Il commence dans le ventre et il finit dans les carotides et la moelle allongée. Il faut lire ce chef d’œuvre de la culture indienne que sont les Yoga Sutras de Patanjali et la place qu’il donne à la moelle allongée dans les processus élevé du Raja Yoga, pour comprendre l’importance de ce tronçon du nerf vague. L'information qu'il transporte se libère dans le sang au niveau des carotides et produits de nombreux effets sur le plan de la conscience.
Or, ces artères là sont l'outil d'extériorisation au niveau sanguin de ce qu'on appelle le glomus carotidien - une glande endocrine - qui est l'expression d'un centre mineur pour certains, majeur pour d'autres, qu'on appelle le centre Alta Major et qui se trouve au niveau de la nuque en bas de l'occiput. Le centre Alta Major participe de l'axe cranio-sacré, et c'est lui qui régule le sang blanc - le liquide céphalo-rachidien - dont la pulsation est captée par les ostéopathes crâniens par exemple. Lorsque le travail au niveau du cœur se réalise, on peut dire que le nerf vague peut commencer à véhiculer ces informations non polluées par nos peurs, nos croyances, nos appréhensions, et dieu sait si nous en avons puisque l’on vit dans une société anxiogène qui nous remplit d'incertitudes ne serait-ce qu'en écoutant les nouvelles, et qui nous empêche de prendre des décisions claires en rapport avec notre avenir.
Lorsque le centre du cœur et le centre du nerf vague au niveau du sternum commencent à opérer ensemble, à ce moment-là les informations peuvent s'élever et s’écouler dans les carotides. Ce faisant, elles régénèrent la petite circulation céphalique (cerveau de tête) et la grande circulation sanguine qui est en relation avec le cerveau du ventre. Par l'intermédiaire du sang des carotides, une relation s'installe entre ces deux parties majeures de l’organisation physique et énergétique de l'homme, sa tête et tout le reste de son corps. Lorsque ces deux parties peuvent cohabiter ensemble, s'apprécier et commencer à s'aimer, à ce moment-là on peut parler du Point d'Assemblage actif et efficient. Donc le Point d'Assemblage on pourrait dire est le centre à l'intérieur de la poitrine, de ce qu'on appelle dans certains enseignements la caverne du cœur, qui permet à l'homme d'être lui-même et de porter un regard sur le monde extérieur plein de respect, de compréhension, et on pourrait aller jusqu'à dire d'amour, sur ce monde qui l'entoure, de manière à ce qu'il puisse se poser des questions véritablement humaines : comment puis-je me rendre utile par rapport à mon environnement, qu'il soit familial, social, biologique c'est à dire planétaire, ou qu'il soit d'ordre solaire. De plus, il peut découvrir à partir de son intériorité les aspects complémentaires de l’activité de ces deux cerveaux harmonisés par l’activité du Cœur. Pour moi, c'est à ce moment là que commence le Service au niveau de la quête spirituelle qui n’est alors plus une conquête. Et pourtant tout a démarré du ventre !
[S] Oui d'ailleurs on parle souvent du deuxième cerveau pour évoquer le ventre. Toutefois, les organismes unicellulaires ont bien un intestin mais pas de cerveau. L'intestin est donc en réalité le premier cerveau, et c'est plus tard qu'un second s'est développé.
Tout à fait, mais cela va beaucoup plus loin. Il y a des recherches qui ont été faites par Mae-Van Ho, http://www.i-sis.org.uk/index.php, (une scientifique anglaise qui a beaucoup travaillé sur la génétique et l'eau), ainsi que Emilio Del Giudice (un physicien italien), et ils se sont rendus compte qu'il existe un système nerveux liquide, qu'ils appellent protonique, le réseau hydro cristallin, actif et présent au niveau des unicellulaires, qui peuvent « penser » leur environnement. Tout se passe par l'eau. Or, ce cerveau là est un cerveau d'eau structurée, cristalline, qui permet au tissu conjonctif d'être un organe perceptif. C'est ce que les fasciathérapeutes et ostéopathes américains sont en train de découvrir et de prouver. Donc non seulement ce cerveau est important, mais c'est pour moi le premier cerveau animal, et c'est lui qui est capable de synthétiser les vitamines, les sels minéraux, des neurotransmetteurs et on ne sait pas encore à partir de quoi !
Au niveau de la médecine chinoise et notamment du Chi Neï Tsang, lorsque l'on apprend à sourire à ses organes, à faire pénétrer le sourire dans le foie, dans les intestins, c'est le début d'une nouvelle perception du corps, non pas comme une machine que l'on doit dompter ou mettre au travail et qu'elle doit suer sang et eau, mais que l'on conçoit comme un partenaire qui mérite non seulement le respect mais avec qui l’on doit travailler en pleine coopération de manière libre et autonome en reconnaissant à chacun ses prérogatives. C'est à dire pour le cerveau du ventre la capacité à appréhender le monde extérieur ; et pour le cerveau de tête qui contrôle notre comportement la capacité de se diriger dans le monde extérieur. A partir de ce moment là, un grand pas est fait vers une entente cordiale, c'est à dire un aspect cœur vivant entre la tête et le ventre. Et quand cela se passe, nos relations avec notre environnement se transforment et peut-être qu'un jour cela aura un impact sur le plan social.
[S] En quoi vos recherches sur le cerveau du ventre complètent-elles vos recherches antérieures ?
Mes recherches ont commencé par l'eau, les liquides, l'eau intracellulaire, l'eau extracellulaire, tout ce sur quoi repose le tissu conjonctif. J'avais commencé par l'alimentation mais après j'ai arrêté. L’eau, l'énergétique, et maintenant à partir de l'énergétique comment passer au-delà ? Mais sans quitter l'énergétique, en gardant les pieds au sol et surtout comment ce sol plein d'humus peut nourrir mon humanité.
[S] La boucle se fait avec ce que vous disiez tout à l'heure, la qualité de la nourriture, etc.
Tout à fait, respect de l'environnement au travers de l'agriculture, respect des paysages. Mais un exemple, j'avais un ami au téléphone hier qui a des problèmes de cœur. Je lui ai dit d'essayer de faire le mudra décrit par R. Zamperini en se mettant en alpha/thêta, c'est à dire en mode perception de l'environnement. Je lui dis "du fait que tu es près de Chambéry, balade toi dans les forêts, mais ce n'est pas toi qui va respirer par tes sens et ta respiration, mais laisse ton ventre respirer ce pigment vert qu'il y a au niveau des arbres. Tu verras le bien que cela va te faire". Je sais que lorsque je descendais en Corrèze pour fabriquer les orgonites au début, je venais de connaître le travail de Zamperini sur tout ce qui est "congestions" au niveau des organes denses et ceux plus subtils, je me suis mis tout de suite dans cet environnement naturel privilégié en Corrèze, en pratiquant ce mudra alpha/thêta et j'ai été ému, plusieurs fois, jusqu'aux larmes, car au fond de toi dans tes tissus, tu sens qu'enfin tes tissus sont reconnus. Enfant on fait ça de manière totalement naturelle, mais adulte, il faut du courage pour laisser s'acheminer une véritable nourriture directement au niveau de tes tissus sans qu'on y ait mis toutes nos croyances, nos souhaits, nos projections. Et quand les tissus sont heureux comme ça, d’une part en raison du respect qu’on leur témoigne, puis de la nourriture qui s’achemine jusqu’à eux de manière naturelle, simple et authentique, c'est une émotion indescriptible qui vient de l’intérieur et que l’on ne connaît pas culturellement. J’appelle cela une émotion naturelle / spirituelle. De même, c'est l'automne qui arrive bientôt, se nourrir de l’orange des feuilles, c'est capital ! Et on n'y pense pas. On préfère acheter des pigments en gélules.
Il faut revaloriser le rôle, la fonction et la participation de ce cerveau entérique, c'est à dire de notre système digestif par rapport à l'environnement. Il faut apprendre à goûter un paysage. Pas simplement s'assoir et prendre une photo pour faire partager ce moment avec d’autres sur les réseaux sociaux. Il faut apprendre à goûter ce moment, à le toucher intérieurement, à le laisser pénétrer en nous par les sens externes et internes. Il faut que le paysage nous touche. Et quand on est touché par quelque chose de ce type, on est ému, c'est à dire qu'on est mis en mouvement de l'intérieur. C'est de ça dont on a besoin aujourd'hui, d'où la nécessité de nous réconcilier avec notre ventre.
[S] Justement, c'est exactement l'effet que m'a fait à son niveau le livre de Giulia Enders : me réconcilier avec la vie fantastique du ventre qu'elle présente comme des êtres vivants, pas comme de la mécanique ou comme des choses. Je me suis dit que c'est vraiment une personne d'envergure et d’un génie particulier. Ce n'est pas étonnant que des millions de lecteurs aient été touchés par la beauté énorme de ce système digestif, qui ressemble tout à fait à ce que vous décrivez, avec la joie profonde dans la nature que l’on accueille en soi. Elle est touchée par la beauté, et elle nous le communique extraordinairement par l'humour, par ses formules, et c'est extrêmement joyeux. Ce serait une belle rencontre entre vous ! Merci Christian pour ce partage.
Références bibliographiques :
Livre "Le charme discret de l'intestin" de Giulia Enders - Editions actes sud
Mae-Van Ho : https://en.wikipedia.org/wiki/Mae-Wan_Ho
Emilio Del Giudice : https://it.wikipedia.org/wiki/Emilio_Del_Giudice
Michael D. Gershon, M.D. : http://www.cumc.columbia.edu/dept/gsas/anatomy/Faculty/Gershon/
Chi Nei Tsang institute : http://chineitsang.marin.free.fr/
Livre "Guérir à partir de l'intérieur avec le Chi Nei Tsang" de Gilles Marin - Guy Trédaniel Editeur
Conférence de Christian Gana sur la chaîne Youtube Navotifamily - playlist "cerveau du ventre"